Elle était allongée, recroquevillée en boule,
et à côté d’elle se trouvaient six chiots vivants, pareils à de la poussière.
Ses yeux étaient comme un lac sans fond,
en eux brillaient la douleur et la peur, et le silence de quelqu’un.
La chaîne à son cou était comme une insulte, comme une sentence,
et ses pattes tremblaient – plus à bout portant.
Elle n’avait pas mangé – peut-être sept jours,
mais elle se nourrissait encore – de son sein, de la douleur, de l’ombre.

Sur elle, rien que des os, de la peau et des cicatrices,
Et dans son cœur, un pouls têtu et obstiné.
Elle n’a rien demandé, juste ne rien lui enlever.
Mes bébés… Je donnerai tout, mais sache que :
Je suis une mère. Même si j’ai faim, même enchaînée,
Même dans la boue, même dans la peur, même dans l’obscurité.
Tant qu’ils respireront, je n’abandonnerai pas.
Et qu’un jour… quelqu’un nous sourie.
Cette image n’est pas seulement celle d’un chien. C’est l’image du désespoir mêlé à un amour maternel sans bornes. Elle n’avait ni nourriture, ni couchage, ni abri contre la chaleur ou le froid. Elle n’avait pas d’eau. Elle n’avait pas de liberté, elle était enchaînée. Mais elle avait six chiots. Et pour eux, elle continuait à respirer.
Chaque jour, elle s’affaiblissait. Son corps – flétri, émacié, sans un gramme de graisse, avec des côtes saillantes – était encore la seule source de chaleur et de lait pour ses bébés. Tandis qu’ils criaient et la recherchaient, elle ne se laissait pas tomber. Elle n’osait pas mourir. Pas maintenant.
Lorsque les bénévoles s’approchèrent d’eux, elle ne grogna pas. Elle ne se précipita pas. Elle regarda simplement. Longtemps. Silencieusement. Comme regardent ceux qui ne croient plus à l’aide, mais qui gardent espoir.
Elle les laissa prendre les chiots dans leurs bras. Elle ne se leva même pas. Elle regarda simplement. Jusqu’au bout, pour s’assurer qu’ils ne seraient pas emportés à jamais. Que ce n’était pas la fin. Que ce pourrait être le début.
Elle s’appelle Greta. Et son histoire est un cri. C’est une requête. C’est un appel pour que nous, les gens, commencions enfin à écouter.
Personne ne savait exactement d’où elle venait. Un jour, une chienne maigre, aux yeux ronds et aux tétons ensanglantés, apparut dans la cour d’une vieille grange délabrée. Elle était attachée à une chaîne. Si vieille et rouillée que le métal avait rongé sa peau, laissant des plaies enflammées. Elle n’aboyait pas. Elle ne courait pas. Elle ne remuait pas la queue. Elle restait assise. Elle s’asseyait et couvrait de son corps osseux les minuscules chiots encore aveugles, dont le pelage ressemblait plus à de la terre qu’à de la fourrure.
Greta – c’est ainsi qu’on l’appela plus tard – mit bas juste sous une marche en béton. Sans aide. Sans litière. Sans eau. Elle rongeait des pierres de soif, léchait ses chiots, en retirant tout ce qu’elle pouvait. À un moment donné, elle arrêta de manger – faute de nourriture. Mais elle continua à les nourrir.
Les voisins n’intervenaient pas. De temps en temps, quelqu’un lançait un os. Quelqu’un passait en secouant la tête : « Les voilà repartis. » Et quelqu’un ne remarquait rien. Il s’en fichait. Et elle seule, cette chaîne indifférente, était nécessaire.
Elle les protégeait même de l’ombre. Quand la pluie commençait à tomber, elle se couchait sur eux. Quand les chats arrivaient, elle grognait de toutes ses forces. Quand ses pattes se crispaient de douleur, elle ravalait un sanglot et continuait à les lécher un par un, pour qu’ils sachent que sa mère était à proximité.
Lorsque les bénévoles l’ont trouvée, elle ne tenait plus debout. Ses pattes avant se dérobaient. Les chiots tétaient son sein, mais il n’y avait presque plus de lait. Elle n’a pas résisté lorsqu’ils l’ont soulevée. Elle a juste crié doucement, comme pour s’excuser de sa faiblesse.
Elle a passé les deux premiers jours au refuge sans bouger. Son corps se débattait. Les chiots furent placés à côté d’elle et, même à moitié consciente, elle les serra contre elle. Elle savait qu’ils ne survivraient pas sans elle.
Les médecins se sont battus pour elle. Il fallait lui administrer des perfusions et la nettoyer. Ses blessures ont été soignées avec soin pour qu’elle ne souffre pas. Mais surtout, ils lui ont dit : « Tu n’es plus seule. »
Une semaine plus tard, elle a commencé à manger. D’abord un peu. Puis plus. Lorsqu’elle s’est levée et a fait quelques pas, toute l’équipe du refuge a applaudi. Personne ne savait comment elle avait fait. Comment elle avait enduré la grossesse, l’accouchement, l’alimentation et la survie en enfer. Comment elle n’avait pas abandonné.
Maintenant, les chiots grandissent. Certains ont déjà trouvé une famille. Ils sont en bonne santé, joyeux, avec un regard bienveillant. Et seule dans leur regard subsiste une ombre insaisissable – comme un souvenir de leur mère qui les avait sauvés, mourant.
Et Greta… Elle a changé. Petit à petit. Son pelage pousse. Son corps prend du poids. Mais surtout, il y a de la lumière dans ses yeux. Pas très brillants. Pas sans peur. Mais vivants.
Elle regarde toujours la porte quand quelqu’un entre. Elle se réveille encore si l’un des chiots couine. Elle ne l’a pas lâchée. Mais elle est vivante. Et elle attend.
On ne peut pas la donner à n’importe qui. On ne peut pas l’enchaîner à nouveau. Son cœur est brûlé. Mais il sait aimer. Il sait protéger. Il sait croire.
Et si vous cherchez plus qu’un chien, mais un sens à votre vie, il est temps de la ramener chez vous.
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